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Introduction à l'Encyclopédie d'ARTFL
- Robert Morrissey
Je suis très heureux de présenter une nouvelle version de l’édition électronique d’ARTFL de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Cette version comporte un grand nombre de corrections et d’additions éditoriales. Cette introduction a pour but de présenter quelques unes des questions d'ordre éditorial, qui sont apparues lors de la mise en place de cette édition, ainsi que les nombreuses améliorations que nous avons apportées durant les douze dernières années. Réaliser une édition électronique de l'Encyclopédie relevait du défi. Sa structure est très complexe; les conventions typographiques utilisées pour les différents éléments du texte (que ce soient les titres d'articles, les classes des connaissances ou même les renvois) varient de manière significative d'un volume à l'autre; la relation entre les articles et les planches d'illustrations n'est en aucune façon claire et systématique. Toutefois, l'informatique offrait une multitude de possibilités nouvelles tant pour rendre l'œuvre accessible aux chercheurs que pour fournir à ceux-ci de nouveaux moyens leur permettant de naviguer dans l'œuvre elle-même. En outre, le support informatique nous a encouragés à concevoir ce projet comme une « édition vivante », c'est-à-dire une édition qui, au fil du temps, serait constamment corrigée, développée et améliorée. C'est pour cela que nous avons choisi dès le départ (1998) de rendre accessible l'Encyclopédie électronique aussi rapidement que possible et d'apporter progressivement par la suite les améliorations et les corrections nécessaires. Afin de compenser les erreurs introduites au cours de la saisie des données, nous avons choisi de reproduire en images les pages de chaque volume pour en faciliter la comparaison et la vérification. En même temps que notre travail de correction, nous avons développé notre logiciel de recherche et de traitement des données. Trop souvent, nos utilisateurs se limitent à effectuer des recherches concernant un mot-clé ou une phrase simple, bien que ce type de recherche ne donne pas toujours les meilleurs résultats. L'utilisation de nos nouvelles fonctions de recherche et de traitement de résultats peut améliorer sensiblement la capacité du lecteur à se déplacer dans ce que Diderot lui-même décrit comme le « labyrinthe tortueux » qu'est l'Encyclopédie. Par exemple, une recherche visant à déterminer la fréquence d'occurences d'un mot classée par article ou une recherche affichant les résultats par tableaux de co-occurrences, peuvent fournir des pistes bien plus utiles (voir ci-dessous pour plus de détails).
Cette nouvelle version marque une étape importante dans le développement de l'édition électronique de l'œuvre monumentale de Diderot et d'Alembert. Elle bénéficie des améliorations apportées au fil des années. Les attributions des auteurs ont été vérifiées et corrigées ainsi que les passages en grec; de nouvelles fonctions de recherche ont été mises en place; de nouveaux documents d'archives ont été mis à disposition des utilisateurs. Cette version inclut non seulement les quatre volumes du Supplément à l'Encyclopédie, mais aussi les épreuves d'articles censurés ainsi que des documents relatifs aux poursuites judiciaires qu'intenta Luneau Boisjermain contre les éditeurs de l'Encyclopédie, le tout étant réunis dans le fameux « 18ème volume». Les utilisateurs de l'Encyclopédie électronique sont bien sûr toujours en mesure de participer à la correction et à l'amélioration de l'édition en utilisant notre lien « report error » (situé en haut à droite de chaque page de résultat) pour nous informer des erreurs qu'ils rencontrent.
Dans les paragraphes suivants, je décrirai brièvement l'histoire de l'Encyclopédie électronique d'ARTFL.
Au commencement: choisir une édition
Dès le début du projet, nous avons dû prendre plusieurs décisions éditoriales majeures qui ont eu des conséquences importantes par la suite. Tout d'abord, il y a eu le choix de l'édition : elles étaient nombreuses à avoir paru dans des formats différents. Nous avons choisi la première impression de l'édition de Paris - voir notre comparaison des éditions de l' Encyclopédie. Richard Schwab a ensuite accepté d'expertiser la version en microfiche produite par IDC (Leiden, Pays-Bas) et a confirmé que c'était une bonne copie de la première édition – c'est à partir de ces microfiches que nous avons fait effectuer la saisie des données. Nous savions que, en raison des complexités typographiques du texte initial, de nombreuses erreurs avaient été introduites lors de la saisie. Malheureusement, la taille de l'Encyclopédie et sa grande diversité sémantique nous empêchaient d'avoir recours à une procédure normale de correction d'orthographe. Mais nous avons décelé d'autres problèmes. Parce que les principaux éléments du texte (articles, auteurs, renvois, etc.) avaient été identifiés automatiquement grâce à des procédures basées sur la typographie, nous nous sommes rendu compte que certains articles avaient été mal identifiés ou non identifiés, qu'il y avaient des auteurs manquants, des informations incomplètes sur les classes des connaissances et les catégories grammaticales, un mauvais fonctionnement des renvois, etc. Résoudre ces problèmes ne pouvaient se concevoir que comme un projet de corrections à grande échelle. C'est pour cela que, en dépit de ces difficultés et en raison de leur complexité, nous avons pensé préférable de publier une version en grande partie non corrigée de la base de données pour ensuite travailler à intégrer progressivement les corrections du texte et des métadonnées à mesure qu'elles seraient faites. Pour en savoir plus sur nos corrections, voir cette page d'explications.
L'un des problèmes les plus complexes que nous avons rencontrés dans la mise en place de cette édition a été d'attribuer correctement les auteurs à leurs articles respectifs. Au début, nous avons simplement essayé d'identifier les auteurs automatiquement à l'aide des différentes marques d'auteur comme elles apparaissent dans le texte - par exemple, (*) pour Diderot, (S) pour Rousseau, (O) pour d'Alembert, etc. - une stratégie qui, bien que généralement couronnée de succès, a néanmoins laissé de nombreux articles non attribués. Les articles avec de multiples auteurs, les articles non signés, et les articles rédigés par des auteurs sans marque posaient tous d'importants problèmes à notre traitement automatique. Pour résoudre ces problèmes, nous avons consulté le monumental inventaire de Schwab (Inventory of Diderot's Encyclopédie, 1971) 1) pour identifier les articles non signés dont la paternité a été attribuée par Schwab et 2) pour corriger toute information d'auteurs qui ne figuraient pas dans nos métadonnées (voir ci-dessous). Les auteurs de 1500 articles non signés que nous avons attribués à l'issue de ce processus sont indiqués par le chiffre « 5 » après le nom de l'auteur, par exemple, Holbach5, Saint-Lambert5, Voltaire5, etc. Pour les articles de Diderot, nous avons suivi l'édition de ses œuvres complètes parue chez Hermann (Lough et Proust Eds.), dont nous avons tiré les désignations « Diderot » « Diderot2 » et « Diderot3 ». Nous avons recouru aux travaux de Martine Groult pour vérifier les attributions à d'Alembert - pour plus de détails, voir notre page sur l'attribution des auteurs.
Corrections de la base de données
La nouvelle version de la base de données de l'Encyclopédie (Version 3.5, 05/2013) contient plus de 650.000 modifications apportées aux fichiers d'origine de 1998, ces corrections ont été faites de différentes manières, tant automatiques que manuelles. Au cours des dernières années, nous avons également travaillé à améliorer et à corriger les métadonnées de l'Encyclopédie – titres d'articles, attributions d'auteurs, classes des connaissance, etc. Nous savons que de nombreuses petites erreurs de texte (provenant de la saisie initiale des données) subsistent encore. Afin de nous aider à identifier et à éliminer ces erreurs, nous invitons nos utilisateurs à recourir au lien « Report Error » situé en haut à droite de chaque page de résultats pour les envoyer directement à ARTFL. Ces erreurs seront recueillies et corrigées périodiquement.
Pour corriger les erreurs dans le texte, nous avons procédé en deux étapes. Premièrement, nous avons identifié et corrigé automatiquement la plupart des erreurs fréquentes. Bon nombre de ces erreurs provenaient du long « s » de la typographie du XVIIIe siècle, qui était souvent confondu avec un « f » (par exemple : semme pour femme). Parmi d'autres lettres sujettes à confusions, il y avait « er » pour « cr » (deseription pour description), « e » pour « c » (done pour donc) et « c » pour « e » (cst pour est). Deuxièmement, nous avons conçu notre propre vérificateur d'orthographe afin d'identifier d'autres erreurs possibles dans le texte que nous avons ensuite comparées aux images des pages de l'Encyclopédie pour les corriger manuellement. De 1999 à 2006, ces procédés nous ont permis de faire plus de 450.000 corrections. Voir notre page sur la correction de texte.
Corrections des métadonnées - Nous avons systématiquement vérifié et corrigé les métadonnées de l'Encyclopédie (titres d'article, classes des connaissance, auteurs, etc.) en vérifiant nos métadonnées initiales à l'aide de Inventory of Diderot's Encyclopédie de Richard Schwab. Toute anomalie dans le titre de l'article, l'auteur, la classe des connaissances, etc. a été vérifiée à partir des images des pages de l'Encyclopédie pour être ensuite corrigée ou ajoutée, suivant le cas. À ce jour, plus de 8000 ajouts et de nombreuses corrections ont été faites - pour plus de détails, voir notre page sur la correction des métadonnées.
Corrections récentes - Au cours des dernières années, nous avons intégré quelques 5.000 nouvelles corrections de texte signalées par les utilisateurs en utilisant le système « Report Error », en haut à droite des pages de résultats. Très souvent, une seule erreur, par exemple esset pour effet, peut générer des centaines de corrections lorsqu’elle est appliquée à toute la base de données. Ainsi, nous prions nos utilisateurs de continuer à utiliser le lien « Report Error » pour signaler non seulement les coquilles ou les fautes de frappe, mais également les petites erreurs textuelles, les erreurs structurelles (articles manquants, titres non-reconnus, etc), les erreurs dans les métadonnées (noms d'auteur, titres, classes de connaissances, etc), liens vers des pages, ou toute autre erreur.
En Novembre 2009, nous avons commencé le processus de conversion du texte de l'Encyclopédie à la norme Unicode (UTF-8) en utilisant un schéma de codage TEI-XML. Cette évolution est importante pour deux raisons: premièrement, nous pouvons représenter et associer de manière cohérente les métadonnées d'un article (auteur, classification, partie du discours, etc.) à l'article lui-même, c’est-à-dire dans un entête TEI-XML pour chaque article, plutôt que de les stocker dans des bases de données externes comme nous le faisions dans le passé. Ceci nous permettra en outre de manipuler les métadonnées dans le futur, en ajoutant des classifications générées informatiquement, des listes d’articles similaires, une section de notes, ou toute autre information pertinente relative à un article spécifique. Deuxièmement, le passage à la norme Unicode a finalement rendu possible la correction des passages en grec dans l’Encyclopédie - voir notre page Corrections du grec.
Nous avons également corrigé un grand nombre, sinon la totalité, des problèmes structurels qui ont longtemps posé problème à la base de données - les articles manquants ou les titres erronés, les textes introductifs mal formatés (par exemple, les "Avertissements",) etc. – ce qui a permis d’exploiter plus de 300 articles et sous-articles supplémentaires. Nous avons en outre fusionné chacun des différents "morceaux" constituant les volumes (chaque volume était constitué de 7 sections de 1MB) en 28 fichiers TEI séparés, supprimant ainsi le problème de "chevauchement" qui empêchait les utilisateurs de passer facilement d’une page à la suivante entre les parties qui constituaient chaque volume.
Autres corrections - Nous sommes conscients que des erreurs de texte subsistent encore et nous invitons nos utilisateurs à nous signaler toute erreur qu'ils rencontreront en utilisant le lien « Report Error » en haut à droite de chaque page de résultats. Pour l'heure, nous réfléchissons au problème très complexe d'établir des liens entre les renvois aux planches contenus dans le texte et les images des planches. Un autre problème qui se pose est celui de la reproduction des formules mathématiques et des différents tableaux. S'il est possible actuellement de faire des recherches dans le texte des tableaux, le meilleur moyen de visualiser graphiquement ces éléments demeure cependant de consulter l'image de la page. Nous n'avons pas encore trouvé une manière cohérente de représenter les formules mathématiques dans le texte numérisé. En attendant une meilleure solution, ces formules ne sont représentées actuellement que sur les images des pages concernées. Pour en savoir plus, voir notre page sur les corrections de l'Encyclopédie.
Renvois - Le système des renvois dans l'Encyclopédie est l'une des questions les plus épineuses que nous ayons rencontrées lors de l'élaboration de cette édition électronique. Dès le début, nous nous sommes rendu compte que les renvois ne sont en aucune manière systématiques — c'est-à-dire, les auteurs ont souvent ajouté une référence à un article n'ayant pas encore été écrit (et qui très souvent ne l'a jamais été par la suite) — créant de la sorte de nombreux renvois qui dirigent le lecteur vers des articles inexistants ou des articles qui ont finalement été intitulés différemment. Nous avons tenté d'identifier les renvois automatiquement en utilisant les conventions typographiques ( «Voy. ART » à la fin d'un article par exemple), ce qui a généré la création de plusieurs liens erronés (par exemple, quand les noms d'auteurs ou d'autres informations à la fin des articles utilisent la même typographie que les renvois ). Récemment, nous avons corrigé quelques 1200 de ces renvois erronés, principalement dus à des noms d’auteurs inscrits en petites majuscules apparaissant à la fin d’articles (par exemple, « cet article est de M. WATELET » et qui avaient été considérés automatiquement comme des renvois. Nous encourageons fortement nos utilisateurs à soumettre les erreurs qu'ils rencontrent concernant les renvois (qu’ils soient mal orthographiés, erronés ou incomplets) en utilisant le lien « Report Error » en haut à droite de chaque page de résultats.
Nouvelles fonctions de recherche et de traitement des résultats
La base de données de l'Encyclopédie utilise une version modifiée du moteur de recherche, PhiloLogic cconçu par ARTFL. Cette nouvelle version comporte plusieurs nouvelles fonctions de recherche et d'affichage des résultats telles que les tableaux de co-occurrences, l'affichage de fréquence d'occurrences de mots par article, et le triage des résultats (KWIC) par ordre alphabétique des mots situés à gauche ou à droite des mots-clés. Bien que les recherches par mot et par phrase demeurent la pierre angulaire de l'interface PhiloLogic, l'utilisation de ces nouvelles fonctions peut offrir d'autres moyens de traiter le nombre gigantesque d'occurrences de mots ou de phrases qui sont parfois générées. Ces fonctions seront particulièrement utiles aux étudiants travaillant sur l'Encyclopédie, car elle leur donneront de nouveaux points d'accès à cette œuvre très complexe.
L'affichage de fréquence par article indique le nombre d'occurrences de l'objet recherché (mot, groupe de mots, etc.) en ordre décroissant de fréquence avec un lien vers l'article et un lien vers les occurrences trouvées dans cet article. Par exemple, si vous effectuez une recherche sur « Newton », vous verrez que 45 des 783 occurrences de « Newton » apparaissent dans l'article « Wolstrope » – ceci pourrait a priori sembler sans importance jusqu'à ce que l'on se rende compte que toutes les informations biographiques sur Newton se trouvent dans cet article sur sa ville natale, un fait qui aurait échappé aux utilisateurs cherchant un article sur la vie de Newton portant un titre différent.
En outre, le contexte et l'aspect relationnels des termes de recherche peuvent être examinés globalement à l'aide des affichages par tableaux de co-occurrences (colocation tables) ou par mots-clés en contexte (KWIC). Les tableaux de co-occurrences offrent aux utilisateurs un moyen simple de voir par fréquence d'occurrences la constellation des mots qui, autour du terme recherché apparaissent le plus souvent et les affichages KWIC permettent aux utilisateurs de trier par ordre alphabétique chaque ligne de résultats, soit à droite soit à gauche du mot-clé surligné - ces deux types d'affichage peuvent aider les utilisateurs à aller plus loin que la simple recherche des occurrences d'un seul mot et surtout les aider à développer une compréhension plus général de l'utilisation de ce mot-clé dans l'ensemble de l'Encyclopédie.
Pour une description complète de ces questions et des autres fonctions de recherche disponibles, voir le Manuel de l'utilisateur de l'Encyclopédie.
Documents de recherche et d'archives
Autour de l'Encyclopédie électronique, ARTFL a commencé à rassembler des documents du dix-huitième siècle relatifs à la production, à la chronologie et à la réception de l'œuvre. On y trouvera notamment plusieurs lettres écrites par Diderot lors de son internement à Vincennes, des documents relatifs à l'histoire mouvementée de la publication de l'Encyclopédie, et une version haute résolution de l'« Arbre généalogique » encyclopédique. En présentant cet ensemble de documents, nous espérons fournir à nos utilisateurs un accès pratique à des informations qui leur permettront d'enrichir leur recherche dans et autour de l'œuvre. Nous sommes constamment à la recherche de nouvelles ressources pour améliorer notre site et nous invitons les chercheurs à nous contacter s'ils sont désireux de contribuer à notre projet avec des idées et des matériaux.
Le «18ème » Volume: une nouvelle ressource
En collaboration avec l'Université de Virginia et sa bibliothèque (Small Special Collections Library), nous sommes heureux d'offrir, pour la première fois, l'accès en ligne au fameux « 18ème volume de l'Encyclopédie » de Douglas Gordon. Ce volume supplémentaire comprend certaines des toutes premières pages de titre et des matériaux préliminaires de l'Encyclopédie, ainsi que quelques 284 pages d'épreuves corrigées d'articles, dont 46 soumis par Diderot, qui ont été censurés ou modifiés vraisemblablement par l'éditeur Le Breton avant impression finale. La présence de ces épreuves, ainsi que la collection de documents légaux relatifs aux poursuites judiciaires qu'intenta Luneau Boisjermain contre les éditeurs de l'Encyclopédie, ont conduit de nombreux chercheurs à croire que ce volume a probablement appartenu à Le Breton. Nous avons inclus à la fois la transcription des articles censurés avec les indications de ce qui a été coupé, ajouté, etc., ainsi que des liens vers l'image des épreuves elles-mêmes. À partir de l'interface de reproduction de page, l'utilisateur peut aussi naviguer dans l'ensemble du volume. L'ampleur de la censure varie considérablement entre les 46 articles, elle va de la suppression de mots ou de phrases à celles de paragraphes entiers (voir « Sarrasins ») et même d'articles, tels que celui de Jaucourt sur la « Tolérance ». Voir la page du 18ème volume.
Recherche et développement actuels
L'Encyclopédie électronique est au centre de la recherche actuelle menée par ARTFL sur l'extraction de données (datamining) et sur les techniques d'apprentissage automatique (machine-learning). Elle a servi de banc d'essai pour expérimenter de nouvelles techniques visant à exploiter les grandes collections numériques. Ces techniques peuvent nous aider à mieux comprendre la richesse du système de classification de l'Encyclopédie, ainsi que la construction dialogique de son contenu. Elles offrent de nouvelles possibilités d'explorer les relations complexes que les articles entretiennent entre eux ainsi qu'avec des sources extérieures. De la sorte s'ouvre tout un champ de recherche sur les citations, les renvois, les relations intertextuelles. Ces dernières années, par exemple, nous avons utilisé diverses mesures de similitude de texte (telles que Vector Space Model and K-Nearest Neighbor) pour détecter la présence d'articles «empruntés» par l'Encyclopédie à deux prédécesseurs jésuites - le Dictionnaire de Trévoux et le Grand dictionnaire historique de Louis Moréri.
Dernièrement, en combinant des classificateurs de Bayes et k-NN (K-Nearest Neighbor)—semblables à ceux utilisés par les filtres anti-Spam des logiciels de courrier électronique—nous avons pu exploiter le système de classification de l'Encyclopédie — ce qui, en informatique et en technologie de recherche d'informations (Information retrieval) s'appelle, son «ontologie» — pour assigner une classe des connaissances aux 13 000 articles (15 000 avec les légendes de planches) qui en étaient dépourvus jusque là, soit par choix des éditeurs, soit par erreur lors du traitement des données. Ce même processus a été utilisé pour ensuite "reclasser" les 61.000 autres articles, ceux dont les classes de connaissances avaient été indiquées par les éditeurs de l'Encyclopédie mais qui n’avaient pas été identifiées par nos classificateurs. Les résultats de ces classifications générées informatiquement pour les 74 000 articles ont été ajoutés aux métadonnées de chaque objet à des fins de recherche et d'affichage. Un peu plus de 73% de ces articles classés informatiquement l’ont été avec leur classification d’origine, résultat stupéfiant compte tenu de la taille et de la complexité de l'ontologie de l'Encyclopédie. Ainsi, les 27% d’articles restants ont reçu de « nouvelles » classes de connaissances qui pourront (ou non) rendre mieux compte de leur contenu. Quoiqu’il en soit, nous espérons sincèrement que ces classes de connaissances informatiques ne manqueront pas d’être la source de nombreux débats et conversations parmi nos utilisateurs. À cette fin, nous explorons la façon dont les utilisateurs pourraient commenter ou évaluer les métadonnées générées informatiquement ainsi que les listes d’ « articles similaires » mentionnées ci-après. En utilisant la même approche mentionnée ci-dessus combinant l'espace vectoriel et k-NN pour définir des similitudes, nous avons identifié les 50 articles «les plus similaires» à partir des quelques 40.000 articles de l'Encyclopédie ayant plus de 60 mots. Les utilisateurs sont ainsi en mesure de consulter un certain nombre d'articles liés (par l'intermédiaire des calculs k-NN) à l'article qu'ils lisent, ainsi que d'une liste des caractéristiques communes (radicaux de mots) entre les deux articles «similaires». Ceci permettra peut-être aux utilisateurs de découvrir des thèmes, des auteurs ou des articles connexes autrement que par des recherches de mots ou de métadonnées. Nous concevons ce nouvel outil comme une manière nouvelle de "naviguer" dans l'Encyclopédie à travers des articles similaires plutôt que grâce à la méthode plus traditionnelle « une recherche-un clic » qui a cours sur les moteurs de recherche comme Google. Toujours dans l’idée d’approfondir la notion de navigation distinguée des recherches simples, nous sommes également en train de mener des expériences afin de produire une représentation du système des renvois qui serait indépendante du texte dans lequel ils se trouvent. Ce niveau d'abstraction pourrait offrir une nouvelle perspective sur la façon dont les articles s’agencent entre eux par l'intermédiaire de ce réseau, un réseau qui selon Diderot était la plus «philosophique» des conceptions que les éditeurs avaient élaborées en matière d'organisation pour l'Encyclopédie.
Notre expérience la plus récente utilise des algorithmes d'alignement de séquences empruntés à la bio-informatique dans un effort pour trouver des séquences de texte distinctes, allant de plusieurs mots à des articles entiers, qui apparaissent à la fois l'Encyclopédie et dans des œuvres antérieures telles que De l'Esprit des Lois de Montesquieu. En développant ces techniques, nous espérons pouvoir arriver à une meilleure compréhension de la nature intertextuelle de l'Encyclopédie, non seulement en mesurant mieux dans quelle mesure ses auteurs ont utilisé des sources antérieures, mais aussi la façon dont les philosophes eux-mêmes ont été reçus et utilisés durant les décennies qui ont suivi la publication de l'Encyclopédie. Pour en savoir plus sur ces recherches et d'autres en cours, voir la bibliographie ARTFL-PhiloMine bibliographie et la page ARTFL Research Blog
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Collaborations en cours
Depuis le début, les collaborations ont été essentielles au développement du projet de l'Encyclopédie et nous continuerons à en encourager de nouvelles. Les plus fructueuses d'entre elles ont toutes contribué aux différents éléments décrits ci-dessus – en nous apportant de nouvelles ressources (University of Virginia pour le 18ème Volume); en proposant des traductions et des classifications (University of Michigan); en contribuant à nos recherches, à l'élaboration des documents annexes, aux corrections ainsi qu'en prodiguant des conseils editoriaux (CNRS), mais aussi en participant à la recherche et au développement (Stanford University). Maintenant que la présente édition de l'Encyclopédie devient accessible au grand public, nous espérons que l'esprit de collaboration de cette « édition vivante » va se développer davantage. Nous voulons encourager tous les utilisateurs à réfléchir aux moyens d'améliorer notre réalisation, que ce soit en signalant les erreurs qu'ils rencontreraient grâce au lien « Report Error » (situé en haut à droite de chaque page de résultat) ou en participant à la réflexion sur son développement. Pour en savoir plus, voir notre page Encyclopédie Collaborations.
Remerciements
Rien de tout cela n'aurait été possible sans la collaboration d'un groupe remarquable de jeunes chercheurs dotés de grandes capacités techniques. La composition singulière de cette équipe nous a permis de trouver un équilibre entre l'innovation technique, l'amélioration du texte, et les décisions éditoriales. Je tiens à exprimer ma gratitude à l'ensemble de l'équipe ayant œuvré sur ce projet pour leur travail.